Vous allez vous lasser – mais lorsque l’un de vos auteurs préférés, Arnaldur Indriðason, sort un livre, Le Duel qui une fois de plus, vous emporte, vous emballe, vous plaît tant que vous le dévorez en une journée – vous ne pouvez pas ne pas lui consacrer un billet. Arnaldur Indridason a donc recommencé. L’auteur islandais a signé un polar magistral – d’abord, parce qu’ici, contrairement à Betty, l’auteur est fidèle à ses trois obsessions : l’histoire (celle de Marion Briem), l’Histoire (la grande) et le genre policier.
Indridason a souhaité s’offrir quelques vacances loin de son personnage fétiche Erlendur, sans pour autant quitter le genre policier, ni même quitter Erlendur puisqu’il vous emmène dans les années 70 à la rencontre de Marion Briem – les addicts des enquêtes d’Erlendur connaissent ce personnage, le mentor d’Erlendur. Tout au long des enquêtes de notre héros, on le découvre vieux, malade (la tuberculose) mais qui inspire toujours autant le respect à son protégé.
Mais revenons au duel – ce duel, c’est celui qui oppose à l’époque de la guerre froide, en 1972 les deux plus grands joueurs d’échecs au monde : Fischer pour les USA et Spassky pour l’URSS. Le duel est organisé sur l’île islandaise qui devient soudainement le centre du monde. Envahi d’espions, Briem est chargé d’enquêter sur le meurtre brutal d’un adolescent dans un cinéma. Très vite, l’enquête va entrainer l’inspecteur Briem sur de multiples pistes dont celle de l’espionnage.
L’enquête est comme toujours, chez le romancier islandais, rondement menée – Indridason adore y mêler l’histoire de son pays et se sert de son île natale comme la centrifugeuse de toutes les crises mondiales qui sévissent. La guerre froide, déjà évoquée à plusieurs reprises dans ses romans (comme de la présence de l’armée américaine) est au centre de l’histoire, symbolisée par le duel entre les deux joueurs d’échecs.
Rassurez-vous, pas besoin de connaître les échecs pour suivre cette partie. Et comme à son habitude, le romancier entre dans la vie de ses personnages par la petite porte : ici la maladie de Briem, la tuberculose, qui comme les fjords qui obsèdent Erledur, accompagne l’inspecteur dans toute sa vie. J’ignorais tout de cette maladie (des opérations qui déforment les corps), des enfants envoyés loin de leurs familles, pour des mois, voire des années, soigner cette maladie et surtout l’impact de cette maladie sur l’Islande. Le pays fut apparemment victime dans les années 50 d’une véritable épidémie de tuberculose emportant de nombreuses vies, surtout celles de jeunes enfants.
Encore une histoire dans l’histoire et comme à son habitude Indridason dirige cette chorégraphie avec une main de maître. Quel plaisir de retrouver le romancier, son style épuré, chaque mot choisi avec soin – et en moins de trois heures j’avais dévoré le roman.
Pour les abonnés au magazine Lire, vous aurez lu la passionnante interview de l’auteur islandais – sa passion pour l’histoire de son pays et ce qui me passionne le plus : le processus d’écriture du romancier. Chaque mot est pesé et l’auteur rature peu – bref, il continue donc de m’impressionner. Je vous invite à lire son interview.
Bref, vous l’aurez compris, un vrai coup de cœur !
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