Comment ai-je pu ne pas lire cette trilogie ? Je la croise depuis des années en librairie, sa couverture rouge et noire, cette maison isolée et ce titre envoutant ! J’ai fini par craquer et m’offrir le premier tome (je ne voulais pas acheter les 3 volumes, ignorant si j’allais aimer). J’avais lu les nombreux avis positifs et j’étais donc impatiente de me lancer, nerveuse aussi – car il m’arrive parfois de ne pas faire partie des heureux qui ont aimé, comme ce fut le cas récemment pour un autre roman.
Mais rassurez-vous : j’ai été rapidement embarquée avec Fin Macleod sur son île natale, au nord de l’Ecosse ! Qu’importe les 33 degrés à Nantes, j’ai senti le vent froid venir s’abattre sur nos visages, la pluie frapper les volets, et très vite, j’étais sur cet îlot rocheux, l’An Sgeir, où il y a dix-huit ans, Fin allait chasser les oiseaux.
Mais je dois peut-être dire quelques mots sur l’histoire ? Fin Macleod est inspecteur à Edimbourg lorsque ses supérieurs lui demandent de se rendre sur l’île Lewis où un meurtre vient d’être commis. Le crime ressemble en tout point à celui sur lequel il enquête et Macleod étant originaire de Lewis, il est tout désigné. L’inspecteur s’y rend à contrecoeur, il n’a pas remis les pieds sur l’île depuis la mort de sa tante, qui l’a élevée après la mort accidentelle de ses parents. Celle-ci était fantasque et le garçon ne s’est jamais attachée à elle.
L’île appartient à l’archipel des Hébrides extérieures tout au nord de l’Ecosse, et reste aujourd’hui à part – on se chauffe encore à la tourbe, on pratique le sabbat chrétien (forte présence de la religion presbytérienne), on parle la langue gaélique. Mais à l’école, l’anglais devient obligatoire, et le petit Fin abandonne ainsi la langue de ses parents. Fin se souvient de son enfance avec son voisin et meilleur ami, Artair Macinnes dont le père enseignait au collège de Crobost. Très vite, ce dernier avait décidé d’offrir des cours particuliers à Fin, le trouvant plus intelligent que son propre fils et lui offrant la chance de pouvoir aller à l’université, et donc quitter l’île. Car Fin refusait de suivre les autres élèves, devenir pêcheur ou ouvrier sur les plateformes pétrolières ou dans les usines locales, aucun de ces métiers ne le tentait. Fin n’avait qu’une envie : quitter l’île.
Fin doit donc affronter ses démons personnels, car on sait qu’un secret a précipité le départ de Fin pour Edimbourg, et que l’homme devenu adulte, continue de fuir. Il faut dire que Fin arrive à un moment difficile, son fils unique, huit ans, est mort renversé par une voiture il y a peu de temps et son mariage vient de prendre fin. La douleur a séparé ce couple. Fin retrouve Artair, en dix-huit ans, son meilleur ami, a grossi, rongé par l’alcool et le travail à l’usine. Il a épousé Marsaili, l’amour de jeunesse de Fin. Ils ont un fils Fionnlagh. Fin est évidemment troublé en la retrouvant, il se souvient de son premier amour, de leurs premiers émois, de ses étés passés sur les plages (cf. photo ci-dessous, oui c’est bien sur l’île de Lewis).
Au fur et à mesure de son enquête, les souvenirs ressurgissent et Fin doit affronter les fantômes du passé et les mensonges du présent. Il retrouve ses anciens camarades et ses ennemis. La victime était son ancien bourreau. Et puis, il arrive aussi alors que la fameuse expédition sur le rocher de l’An Sgeir va avoir lieu. Une vieille tradition où les hommes prenaient la mer, affrontaient les éléments pour aller tuer des milliers d’oisillons nichés sur cette île. Depuis, le gouvernement n’autorise cette sortie qu’une fois par an et limite à deux mille le nombre d’oiseaux – mais un massacre reste un massacre. Fin se rappelle qu’il ne voulait pas à aller sur cette île, mais Artait l’avait supplié et Fin avait fini par dire oui. Un drame allait se jouer. Presque vingt ans plus tard, la lectrice que je suis a eu du mal à lire ce passage sur ce massacre mais je sais aussi que ce lieu était essentiel à l’histoire. L’histoire y trouve son paroxysme.
Que dire ? J’ai beaucoup aimé mon séjour dans les Hébrides avec Fin Macleod et je serais heureuse d’y retourner. Peter May décrit avec talent l’atmosphère très particulière de cette île, son histoire, la main-mise de l’église presbytérienne, la crise économique et l’isolement endémique à ce mode de vie. J’étais avec lui à Lewis et je l’en remercie. Les personnages sont bien travaillés et Fin Macleod est très attachant.
Mon seul bémol sera peut-être la toute fin, vraiment la toute fin, un peu trop belle pour moi, mais je suis difficile ! En attendant, j’ai beaucoup aimé la prose de l’auteur, son talent à décrire les sentiments amoureux d’un enfant ou d’un adolescent, Peter May m’a épaté avec la puissance de ces mots, sa capacité à reproduire si bien les émois adolescents.
Je ne regrette donc pas d’avoir finalement sauté le pas ! Et vous l’avez deviné, il me faut à présent acheter les volumes deux et trois de la trilogie. Hâte de retourner en Ecosse et j’ai déjà l’impression d’y être, puisqu’à l’instant où j’écris ces mots, une violente pluie vient de s’abattre sur mon balcon !
♥♥♥♥♥
Editions Actes Sud, coll. Babel Noir, The Blackhouse, trad. Jean-René Dastugue, 424 pages
16 commentaires
Cette trilogie est ce que j’ai préféré de Peter May, c’est une grande réussite. Tu verras que le tome deux est exceptionnel aussi, le troisième un peu moins fort – à mon avis ! – Si ça t’intéresse tu peux trouver des documents sur St Kilda et l’histoire de cet îlot, très intéressant et étonnant. Bonne journée !
Oui j’ai lu ci et là que le deuxième est le meilleur ! Je chercherai sans doute des infos. J’ai lu un autre roman de Peter May qui n’avait rien à voir avec l’Ecosse ou une enquête.
J’ai lu « L’homme de Lewis » sans faire attention que c’était le Tome 2 (j’ai la trilogie en stock), et c’est vrai que c’est bien ! Tu me donnes envie de les ressortir de leur étagère !
C’est vrai ? oh je fais toujours attention mais donc ça se lit bien sans avoir lu le premier, c’est bon à savoir ! Oui, je vais garder la suite pour plus tard dans l’année, j’aime bien faire trainer le plaisir !
Ma bibli number 1 ne possède que le 3 de la trilogie (et un autre qui ne me parle pas) la bibli number 2 : rien!
Nul mais je suis sûre que tu vas les trouver chez une connaissance !
J’avoue ne pas être totalement enthousiaste. mais j’aime l’ambiance que Peter May crée toujours avec talent.
Pas de souci ! C’est une ambiance particulière c’est vrai. Le lieu y joue pour beaucoup.
comme toi, je croise cette trilogie depuis un certain temps, et elle me fait vraiment envie…sans que j’aie eu l’opportunité de sauter le pas! j’étais donc curieuse de connaître ton avis, et je suis ravie de voir que ce 1er tome t’a beaucoup plu! (et quand j’entends que le 2e tome serait encore meilleur?!)
il me faut cette trilogie!
Oui, c’est amusant parfois comment on remet la lecture d’un livre à plus tard, on tourne autour .. je l’ai vu si souvent en librairie ! Mais tu peux y aller à présent 🙂
j’ai adoré cette trilogie, il y a des défauts, c’est sûr, la fin de ce premier tome effectivement (mais elle est logique avec la nécessité d’une suite possible en même temps) et d’autres par la suite. Dans mon souvenir, le deuxième m’avait moins embarquée dans l’ambiance écossaise, ce qui ne m’avait pas empêché de dévorer le dernier aussi !
c’est amusant car souvent les gens ont préféré le deuxième opus et toi non – mais oui, je vais y retourner prochainement ! Je dois aussi reprendre la trilogie de Kerr. J’ai vu une fille dans le tram qui la lisait ce matin, un bon rappel !
Beau roman, rien à redire, à part peut-être un rythme un peu lent. Une bonne lecture dans l’ensemble!
Oui ! J’ai bien aimé me retrouver sur cette île; reste à lire les deux autres opus ! Le rythme, une affaire de goût 😉
L’homme de lewis .superbe.la confrontation entre le passé de l’enfance et le présent de la vieillesse démente,mais avéc la tendresse de l’auteur qui va chercher dans la démence du vieil homme l’humanite et les souvenirs de l’enfance.de belles phrases qui me font regarder d’un autre œil les pensionnaires de l’ehpad De ma mère…
Ah oui ! Nos têtes de remplissent de souvenirs et nos visages de rides comme les sillons d’un 33 tours ..
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