Devant le pénitencier de Grassland près de Chicago, un homme attend. Il guette la sortie de Hartley Nolan, emprisonné depuis quatre ans pour homicide involontaire. Par sa faute, une jeune femme, Sonia, avait trouvé la mort dans un tragique accident de voiture. Une onde de choc avait alors traversé les deux familles, celle de la victime et celle du coupable. Et l’ancien golden boy au destin brisé n’a peut-être pas fini de payer sa dette, car l’homme qui l’attend occupait une place particulière dans la vie de Sonia… Mais quand la libération de Hartley est repoussée de vingt-quatre heures, toutes les cartes sont rebattues.
Lorsqu’on m’a proposé la lecture de ce livre, j’ai tout de suite répondu oui car la quatrième de couverture a piqué ma curiosité.
Baird Harper raconte ici l’histoire de deux clans, frappés par le deuil suite à un accident de voiture qui a causé la mort d’une jeune épouse et la culpabilité (en l’occurrence la famille du conducteur). Les années passent et le conducteur quitte la prison mais il ignore qu’un ami de la victime a décidé de venger sa mort en allant le cueillir à sa sortie de prison. Evidemment rien ne se passe comme prévu..
Il est m’est compliqué de raconter la suite de l’histoire sans trahir l’histoire. J’ai eu l’impression de regarder cette histoire à travers un kaléidoscope. L’auteur nous invite à suivre les pensées d’une dizaine de personnages, proche de la victime, Sonia, ou du conducteur, Nolan. Et le résultat est passionnant car Baird Harper ne nous offre pas une vision en noir et blanc.
Ainsi, j’ai beaucoup aimé le regard de Baird Harper sur la famille en général, sur la culpabilité, ainsi la nervosité de la mère du conducteur est touchante, comme la colère de la famille de Sonia qui trouve que la sentence a été trop légère. Découvrir ainsi qui se cache derrière Nolan, un époux malheureux dont la femme est alcoolique. J’ai adoré également de ne pas savoir où l’histoire nous mène. J’ai apprécié le travail de l’auteur sur la fragilité de nos existences lorsqu’un évènement vient bouleverser l’ordre établi. Et puis ce jeu perpétuel d’abimes, puisque chaque personnage (une dizaine) est évidemment jugé par ses pairs dans d’autres chapitres. L’auteur américain n’épargne personne, même Sonia.
Elle portrait toujours un toast au photographe (..), elle était toujours souriante, souriante, souriante – l’ébriété paraissait lui avoir procuré ce niveau élevé de popularité et de bonheur auquel Glennis aspirait depuis longtemps.
Je pense honnêtement que ce livre peut plaire énormément comme il peut décourager dès le départ par sa construction narrative inédite. Et pourtant j’étais prévenue, l’éditeur l’annonce : « En onze chapitres qui se lisent comme autant de nouvelles… » et une lectrice sur IG m’avait alertée à ce sujet. Le titre américain est très clair : Red Light Run : linked stories. Lectrice assidue de nouvelles, je n’ai pas souffert de ce choix narratif même si j’avoue avoir été surprise au tout début ; le changement de personnages entre le premier et le deuxième chapitre est subtil. Après, je me suis rapidement habituée à ce changement de voix narrative et j’ai trouvé l’histoire passionnante.
Un livre à la construction désarmante mais dont je garde, quelques semaines après ma lecture, un sentiment de plaisir ressenti lors de ma lecture. J’ai fini apprécié d’être désarmée et comme j’adore les nouvelles, j’ai trouvé ce choix plutôt audacieux.
Cela ne m’étonne donc pas d’apprendre que Baird Harper a publié de nombreuses nouvelles dans les revues américaines et qu’il a été récompensé par le prestigieux prix Raymond Carver en 2014. Il est professeur d’écriture à l’Université Loyola ainsi qu’à l’Université de Chicago. Demain sans toi est son premier roman.
♥♥♥♥♥
Editions Grasset, coll. En lettres d’ancre, 2017, Red Light Run, trad. Brice Matthieussent, 288 pages
10 commentaires
Rha la la ça m’a l’air tout à fait excellent (et rien à la bibli mais c’est récent, ça peut donc arriver)
Oui ! Il a dérouté quelques lecteurs mais moi j’ai bien aimé
Je l’ai reposé à la moitié… C’était plutôt bien parti, puis je me suis lassé de la forme. Comme si c’était forcé, que ça ne coulait pas naturellement. Certains personnages étaient bien campés alors que d’autres m’ont agacée (trop clichés). Je ne m’attendais pas à tes 4 coeurs!
Oh ! Amusant que l’on ait pas eu la même réaction. Sur IG une lectrice avait aussi eu des difficultés. A la fin il dresse les portraits de la victime et donne une vision de la société. La forme m’a déroutée mais l’évolution du roman m’a plu. J’aime bien nos avis divergeant ! Trop rares
Moi aussi, j’aime bien nos avis divergeant. Je vais me forcer pour qu’ils soient moins rares!!!
Mdr ne vas pas mentir
Disons que si je n’avais pas autant de lectures en retard, je me laisserais bien tenter 😉
En retard ? oh moi ça ne m’arrive jamais 😉 Je plaisante, bon courage !
Pas trop tentée par le thème. Mais cela me rappelle l’excellente série « Rectify ». Alors, peut-être !
Ah je n’y ai pas pensé. Il y aussi eu une série norvégienne sur le retour d’un ancien condamné. Le nom m’échappe. Ici l’histoire tient sur deux jours.
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