Trois bande-dessinées très différentes cette semaine.
Comment comprend Israël en 60 jours ou moins – Sarah Glidden
♥♥♥♥
Sarah Glidden est une jeune femme new-yorkaise, de confession juive mais non pratiquante, qui a décidé de participer au programme Taglit qui permet aux jeunes gens juifs du monde entier de venir découvrir Israël, tous frais payés. De retour au pays, elle a publié son récit sous forme de mini BD. Le succès aidant, une version longue a été éditée.
Le programme Taglit est financé par le gouvernement israélien qui offre une visite guidée des principaux sites du pays : Tel Aviv, le mont du Golan, Masada et Jérusalem.
Sarah est juive mais non pratiquante. La jeune femme suit l’actualité et son petit ami est musulman, d’origine pakistanaise. Elle s’inquiète de la situation des territoires occupés, aussi elle est très méfiante du discours officiel qui l’attend. Accompagnée d’une amie pratiquante, elle va découvrir que rien n’est simple. Sarah ignore qu’elle s’embarque dans un voyage émotionnel très fort. Son expérience et ses a priori sont bousculés par ce qu’elle entend et voit.
Sarah provoque la discussion avec les guides mais également les jeunes militaires qui les accompagnent lors de certaines excursions. Certaines excursions (comme le film diffusé) sont très orientés politiquement mais en d’autres lieux, les guides restent mesurés.
Elle réalise, et moi à travers elle, que les jeunes gens de sa génération craignent à présent la création d’un territoire palestinien – les plus anciennes générations regrettent qu’il ne fut pas créé dès les années 50 ou 60 et blâment les Palestiniens pour cet échec. Depuis les relations entre les pays arabes et Israël se sont dégradées au fil des ans, avec les guerres (du Kippour ou du Golan) et les jeunes israéliens justifient leur position parce qu’ils ont toujours entendu que les « Arabes veulent les jeter à la mer« . J’avoue que je me suis interrogée sur ces propos (Sarah était aussi surprise mais ne leur a jamais demandé d’où venait cette crainte, si bien ancrée).
Sarah avait, avant son départ, prévue de se rendre seule dans le territoire de Gaza avec l’aide d’une organisation non gouvernementale mais tout va se compliquer. Elle prend conscience que la situation est extrêmement complexe et que le pays est très divisé, entre les Orthodoxes pratiquants et les laïcs. La situation est toujours très tendue.
Elle réalise peu à peu que ses préjugés étaient fondés sur ses propres peurs et qu’elle doit regarder la situation en Israël avec un regard différent. Sarah sait que pour comprendre ce pays, elle doit d’abord découvrir qui elle est réellement.
J’ai aimé cette lecture, très instructive, comme l’excursion à Masala dont j’ignorais tout. Il faut dire que deux mois sur place permettent ce regard différent sur cette région du monde où la peur de l’autre guide les décisions politiques depuis près de cinquante ans. Je me sens chanceuse de vivre en Europe où on n’a plus peur d’être envahi à tout moment par un pays voisin.
J’aurais aimé que Sarah puisse rencontrer des Palestiniens ou des arabes israéliens pour « entendre » leurs voix également mais c’est mon seul et unique bémol.
Editions Steinkis, trad. Fanny Soubiran , 2011, 204 pages
Punk Rock & Mobil Homes – Derf Backderf
♥♥♥
Je ne pensais pas retrouver si vite, pour la troisième fois, l’auteur Derf Backderf ! Je l’ai trouvé par hasard en allant à la bibliothèque. J’ai hésité à peine une seconde, j’ai adoré Mon ami Dahmer et Trashed. Toujours fidèle à son adolescence, l’auteur américain nous entraine à nouveau dans la banlieue d’Akron, en Ohio. A Richford dans les années 80.
Dans un parc de mobil-homes, appartenant à son grand-oncle, Otto Pizcok est en terminale. Immense gaillard (de plus de 2 mètres), le garçon, au physique plutôt disgracieux, fait souvent l’objet de brimades au lycée. On se moque de lui, on le bouscule, malgré sa taille impressionnante. Mais Otto n’en a que faire, surnommé « Le Baron » il a déjà le projet de quitter la ville, la région et de devenir une star.
Avec ses deux potes, il fréquente « The Bank », une ancienne succursale transformée en salle de concerts où les pionniers du mouvement punk rock viennent jouer. Le Baron, avec son physique atypique et son goût pour la musique, se fait remarquer et il est rapidement embauché pour s’occuper des artistes de passage, Joe Ramone, ou Joe Strumner viennent jouer ici alors qu’Aérosmith remplit des stades. Otto prend enfin son pied, à défaut de pouvoir sortir avec Terry Workman dont il admire en cachette la poitrine très généreuse.
Ici, on s’amuse beaucoup, tout en écoutant de la très bonne musique – l’auteur livre une liste de titres à écouter en lisant son roman graphique.
Punk Rock rend hommage à toute une génération de musiciens, majoritairement disparus (à la fin, l’auteur raconte l’avenir de ceux qui sont venus jouer à Akron). Mais c’est également un roman graphique désopilant sur la jeunesse et ses obsessions (mater les filles, se mettre à poil, se saouler). Backderf réussit à chaque fois, en mélangeant probablement souvenirs personnels et fiction, à retranscrire cette période mouvementée de l’histoire de la Rust Belt, cette zone industrielle violemment frappée par le chômage.
Le Baron est un personnage vraiment à part, comme il y en a toujours un dans tous ses romans, et Otto est profondément attachant et émouvant. Un roman graphique qui fourmille d’informations pour les fans de ce genre musical et qui s’adresse à un lectorat plus adulte que ses autres romans.
Je réalise que j’ai lu tous ses romans graphiques publiés en français. Une première en BD !
Editions Ca et Là, 2014, trad. Philippe Touboul, 154 pages
Groenland Vertigo – Tanquerelle
♥♥♥
Invité à participer à une expédition danoise au Nord-Est du Groenland, Georges Benoît-Jean, dessinateur maladroit et angoissé, va devoir s’adapter aux situations les plus rocambolesques. Attention, le vertigo arctique n’est jamais bien loin ! Une comédie d’aventure inspirée de faits réels qui rappelle autant la fantaisie des Racontars de Jørn Riel que l’intemporalité d’Hergé.
Voici la présentation de l’éditeur, si le dessin rappelle celui d’Hergé, j’ai quand même moins rigolé que dans les racontars de Jørn Riel – j’avais même oublié d’en parler sur le blog. Mais en le croisant de nouveau, mes souvenirs sont remontés à la surface. L’expédition se déroule pendant 3 semaines sur une goélette dans un parc national du Groenland. Elle est composée de scientifiques et financée par l’artiste mondialement connu, Ulrich Kloster, qui doit installer in situ son oeuvre monumentale sur ces lieux magiques.
Notre dessinateur est donc ravi d’accepter, mais très vite les choses ne se passent pas comme prévu…. Une lecture agréable, le dessin est simple mais parlant, et j’ai aimé les couleurs (leur vivacité). J’ai cependant trouvé qu’il manquait du sel à l’histoire.
Editions Casterman, 2017, 100 pages
7 commentaires
Oh mais je les ai toutes lues, ces BD!!! (et bien sûr je n’en ai pas parlé sur le blog ^_^)
impossible de résister !
Je réalise que j’ai lu la seule BD en photo dans ta chronique mais pas évoquée : celle de Guy Delisle, que j’adore ! Je note les autres, du coup 😉
Super
On vient de m’offrir Punk Rock et Mobil Homes !
Ah ! Génial !! Tu es chanceux !!
J’ai lu « Comment comprendre Israël… » il y a longtemps, et je me souviens qu’il m’avait intéressée…et c’est tout! pas d’autres souvenirs !par contre, je pense que tu veux dire Massada et pas Masala? ^^
Il faut vraiment que je découvre Derf Backderf, je suis sûre que cet auteur me plairai!
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