J’avais hâte de découvrir le premier roman de Kevin Hardcastle, Dans la cage dont je n’avais entendu que d’excellents échos. Lui-même amateur de boxe et de free fight, l’auteur canadien nous livre un premier roman unique.
Daniel est un ancien champion de boxe et de free fight qui lui avait permis de fuir la petite ville ouvrière d’Ontario d’où il était originaire. Mais une vilaine blessure met fin à ses rêves. Endetté, sans travail, il retourne s’installer à Simcoe avec son épouse et leur fille, âgée de douze ans. Daniel gagne désormais sa vie comme soudeur, mais son salaire et celui de sa femme, aide-soignante, ne suffisent pas à joindre les deux bouts. Leur maison aurait un sérieux besoin de travaux, comme leur voiture. Dans cette région, minée par le chômage, il est difficile de trouver d’autres sources de revenus aussi Daniel accepte-t-il de jouer les gros bras pour son pote, Clayton, un caïd et ami d’enfance. Mais très vite, les virées nocturnes avec Clayton et ses bras droits prennent une tournure inquiétante et Daniel refuse de continuer.
Daniel découvre alors que son ancien coach a ouvert une nouvelle salle d’entrainement et Daniel est ravi de pouvoir y retourner quotidiennement, défouler son trop plein, sa rage. Puis une mauvaise nouvelle tombe : Daniel n’a plus de boulot. Le matin, le visage boursouflé, les nerfs tendus il va déposer des CV et tous les après-midi, il retourne s’entraîner à la salle. Lui vient alors l’idée de gagner de l’argent d’une autre manière : en remontant sur le ring.
Mais Daniel ignore tout du dessein qu’il l’attend et de l’emprise de Clayton sur le ring….
Tarbell leva la tête (…) Il respira à fond et fixa le mort (…) Il s’arracha au mur et sortit de la maison. Le cri des huards résonnait dans le lointain crépuscule. Le jeune homme aux yeux pâles leur renvoya leur cri.
Tout en tension et en émotion – ces deux adjectifs employés par l’éditeur qualifient sans doute le mieux ce premier roman dont le personnage principal ressemble à ces hommes pris au piège, perpétuellement au combat sans jamais pouvoir se reposer. Une tragédie grecque, ai-je lu et il est évident que l’on sait en lisant ces pages que le petit monde de Daniel va être à nouveau bousculé, chamboulé. A chaque page tournée, on ne peut s’empêcher à penser à la suite, à la fragilité de ce semblant de vie. Daniel aime son épouse et adore sa fille, tous deux sont de très bons parents qui font du mieux qu’ils peuvent.
Ce qui m’a aussi beaucoup plu, c’est que contrairement à beaucoup de romanciers, ici la femme n’est pas effacée ou caricaturée, comme je l’ai vu dernièrement (la femme maîtresse, la femme qui trahit), elle est au contraire celle qui, tout en prenant soin de sa famille, as ses propres aspirations. Kevin Hardcastle livre un magnifique portrait de femme, celle qui veut réussir son examen, qui se bat pour les siens, qui aime son mari et leur enfant. Et qui aime son métier auprès des personnes âgées et partage parfois la nuit des moments magiques avec eux.
Kevin Hardcastle maîtrise déjà parfaitement l’art de faire de nous des témoins de la vie d’un couple touchant, émouvant. Impossible de ne pas s’attacher à eux, à leurs faiblesses mais aussi à leur courage. Un roman fiévreux qui m’aura emportée à la fin.
« Un livre nerveux dans lequel s’exprime la toxicité amère de ce que le roman noir offre de plus beau. »
Kirkus Reviews
« Imaginez un poing qui se serre lentement, phalange après phalange, et vous aurez un aperçu de la façon dont ce jeune écrivain construit son récit, avec une précision tout à la fois sombre, hypnotique, bouleversante et humaine. »
The Globe and Mail
Dorénavant, je suis très impatiente de pouvoir lire son premier recueil de nouvelles, Débris, qui paraîtra prochainement aux éditions Albin Michel.
♥♥♥♥♥
Éditions Albin Michel, In the cage, trad. Janique Jouin-de-Laurens, 2018, 352 pages
16 commentaires
Ah un avis positif pour ce livre! Je ne lis que des avis mitigés !
Oui, j’ai lu une critique très dure – je n’ai pas compris car les personnages sont très attachants, il y a une histoire avec un début et une fin, il y a une atmosphère et le style possède de belles envolées lyriques – franchement, ce livre est bien au-dessus de certains livres qui font du bruit 😉
Il suffisait d’attendre, voilà une critique positive (j’en ai lu deux assez négatives)
Oui, je suis étonnée – je ne vois pas trop ce qui déplaît, c’est nerveux et fiévreux et plutôt sombre (même très sombre) mais il y a tant de moments attendrissants.. bref, bizarre !
Je fais partie des déçus. Tout est survolé et tout le récit est au service de l’action. Je n’ai ressenti aucune émotion, aucune profondeur chez les personnages. Surtout il y a de nombreux passages avec Clayton et son taré de neveu qui ne sont pour moi qu’une débauche de violence gratuite fourmillant de détails aussi sordides qu’inutiles absolument pas au service du récit. Le chapitre dans le bar par exemple. Trois pages pour décrire un double meurtre gratuit, sans aucun intérêt pour l’intrigue. Vraiment j’ai été très déçu.
ah tu t’es attaché à ça ? c’est vraiment intéressant, car du coup, moi j’ai vraiment pas lu le même roman ! J’ai vu cette femme qui élevait sa fille et savait que son mari avait une carrière brisée, qu’il tente de joindre les deux bouts et reprend le combat .. j’ai vu tout de leur angle du coup j’ai trouvé ça bon ! Il y a bien d’autres livres que j’ai moins aimés où j’ai trouvé la violence gratuite et les personnages bidons – moi j’étais super attachée , surtout à la femme, Dan aussi, mais sa femme, dans la maison de retraite, et leurs voisins qui s’occupent de la gamine et puis la relation avec son père, bref du coup, j’ai zappé Clayton – quand à son neveu, je l’ai juste vu comme la Faucheuse qui vient faire son boulot. Deux visions du même bouquin, on serait pas mal dans une interview ? LOL
C’est juste un peu du déjà vu, je trouve, pour ma part, mais ça tient bien la route quand même.
Déjà vu ? Peut-être pour toi, moi ça faisait un bout de temps que je n’avais pas lu un roman si noir – généralement, ça se terminait pas trop mal ces derniers temps dans les romans américains, on y croyait presque (genre le concours entre auteurs pour faire clamser un chien à chaque roman.. ça oui, je commençais à me lasser). J’ai trouvé les personnages très attachants et ça fait du bien parce que je me lassais aussi des « méchants »
Tu le sais, je compte le lire. Entre ton avis et celui de Jérôme, j’ai hâte de me faire ma propre idée et de savoir de quel côté je vais pencher!
Pas vu le billet de Jérôme, mais du coup je sais qu’il a du être déçu vu ton commentaire ! Oui, tu te feras ainsi ton propre avis. Je lis Chaon et j’ai lu un avis très négatif sur son roman avant d’en voir des positifs sur IG, donc là pareil, de quel côté vais-je pencher ???
Ben il est passé où mon commentaire de ce midi ? J’avais laissé une tartine en plus ?^^
Il est là .. il arrive bizarrement tard, vu la longueur WP l’a modéré .. et je ne regarde mes mails que ce soir ! mais je l’ai approuvé 😉
Il me tente beaucoup mais l’univers de la boxe me refroidit un peu ; pour la « violence », je ne m’inquiète pas trop, j’ai déjà lu quelques polars bien gratinés et ça passe crème !
Oui, je suis tes lectures de près et les quelques scènes de violence ne sont pas très méchantes ! Pour la boxe, c’est accessoire (on suit un ou deux entrainements et un seul combat) donc vas-y !
Une de mes prochaines lectures en prévision du Festival America! J’ai eu des échos mitigés, je suis contente de lire que ce roman t’ait plu !
Oui, apparemment je n’ai pas lu le même roman, moi je me suis attachée aux personnages et j’ai beaucoup aimé !
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