Impossible de le dénicher en France (à l’époque), j’avais eu l’idée de le commander et de le faire livrer chez le Caribou en mars dernier. Mais le livre est arrivé bien plus tard, le jour de mon retour en France ! Du coup, le Caribou me l’a rapporté à Vincennes fin septembre. Après une lecture en mi-teinte, il me fallait une lecture doudou et je savais que Joseph Boyden était le bon !
Je me suis lancée dans cette lecture sans connaître l’histoire, j’ai donc découvert au fil de ma lecture l’histoire de Chanie, un garçon Ojibwe qui vient de s’enfuir, avec deux autres élèves (deux frères) du pensionnat dans lequel il est enfermé depuis deux ans. C’est l’hiver en Ontario et les garçons doivent faire vite, ils savent que s’ils sont rattrapés, ils seront sévèrement punis. Chanie a du mal à suivre le rythme, il souffre de tuberculose, une maladie répandue dans ces pensionnats. Il fait très froid et ses deux comparses peinent à ralentir pour lui. Chanie fait donc tout son possible pour tenir le rythme, malgré la douleur intense et la peur constante d’être repris.
Il n’a qu’une obsession : retrouver sa famille, son père, ses soeurs. Très vite, il s’enfonce dans la forêt. Le ventre vide, les poumons en feu, il ne remarque pas les Manitous – les esprits de la forêt qui le suivent dans sa fuite. Les Manitous savent déjà quelle sera l’issue de son parcours, ils l’accompagnent, en prenant la forme de tous les animaux de la forêt : poisson, hibou, castor ou araignée.
Joseph Boyden a choisi d’accompagner son histoire avec les sublimes illustrations de Kent Monkman – qui font de ce livre un véritable petit bijou. Lorsque Chanie prend la parole, il est touchant. Le garçon a refusé d’abandonner sa langue, sa culture. Comme son père lui a dit, il a continué à penser dans sa propre langue, à prononcer chaque mot en Ojibwe, simplement dans sa tête. Il a subi comme les autres enfants les violences et les brutalités de ces pensionnats. Des élèves qu’ils connaissent ont fui, d’autres ont été retrouvés mais ont disparu subitement. Il a treize ans et sait qu’il doit absolument leur échapper.
L’histoire est très touchante. N’ayant souhaité rien lire de l’histoire, j’ai appris seulement à la fin que Chanie a réellement existé. Mais surtout que pour Boyden, il est la voix de ces milliers d’enfants indiens arrachés à leur famille, envoyés dans ces pensionnats. La réalité est terrible: sur les 150 000 envoyés dans ces lieux de violence, 6 000 ne sont jamais revenus. On comprend dès lors ces enfants fugueurs prêts à affronter les hivers rudes canadiens pour retourner auprès des leurs.
Wenjack est un hommage poignant à tous ces enfants et l’auteur a souhaité que soit reversé à une association une partie des bénéfices. J’ignore s’il sera traduit en français, ça me paraît essentiel qu’il le soit, surtout au Québec puisqu’il aborde le sujet des pensionnats canadiens.
Pour ma part, j’ai encore dans ma tête, l’image de Chanie, fatigué, le ventre vide, et qui pour ne pas s’endormir, s’entraîne à compter à rebours de 5 à 1 dans sa langue natale :
Naanan
Niiwin
Niswi
Niizh
Bizhig
J’ai lu ce roman dans le cadre du challenge Nation Indienne en 12 lectures.
♥♥♥♥♥
Editions Hamish Hamilton, 2016, 112 pages
6 commentaires
Vite une traduction !!!!!
Oui et là je peux la faire car le livre est très court, faut juste dénicher un éditeur 😉
Dire qu’il a traîné près de moi pendant quelques mois! Quel bel objet…
Oui, VITE une traduction. J’espère qu’ils conserveront les illustrations de Kent Monkman. C’est un plus pour accompagner cette histoire (et cette effroyable réalité). Comme tu dois t’en douter, je me languis d’impatience…
Oui, un bel objet et une belle histoire.
Oui, les illustrations doivent demeurer – une histoire évidemment triste vu le sujet mais tellement bien traitée.
Il faut que je me penche sur les autres romans de Boyden déjà traduit! J’avais tellement aimé Le chemin des âmes.
Oui et moi aussi, il faut que je reprenne ma lecture, en vo ou en français
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