Shtum · Jem Lester

par Electra
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C’est en croisant la couverture (anglaise) que ma curiosité a été piquée, puis j’ai lu la quatrième et les critiques enthousiastes, et quelle surprise de le voir édité en français par Stéphane Marsan. Et Masse Critique a exaucé mon voeu, le voilà entre mes mains.

Parfois la présentation de l’éditeur suffit – en dire plus, ou en dire moins ? Difficile. La voici :

Ben a presque tout raté dans sa vie. Sa carrière est au point mort, son couple part à vau l’eau, son fils est « différent ». À dix ans, Jonah ne parle pas. Lorsqu’ils sont tous deux contraints d’emménager chez le père de Ben, trois générations d’hommes – un qui ne sait pas parler, deux qui s’y refusent – sont réunies sous le même toit. Alors que Ben engage une bataille juridique éprouvante pour obtenir le placement de son fils dans un établissement spécialisé, Jonah se rapproche de son grand-père dont les jours sont comptés. Et cet homme qui n’a jamais révélé le secret de ses origines, se met à parler, pour la première fois, à ce garçon qui n’a pas de mots pour lui répondre. C’est peut-être l’occasion pour Ben de se rendre compte que sa plus grande réussite, c’est son fils.

Inspiré en grande partie de son histoire personnelle, Jem Lester (journaliste) livre ici un livre formidable sur trois générations d’hommes – le grand-père, juif hongrois rescapé de la Shoah, Ben, qui depuis la naissance de son fils a tout lâché : son couple, son boulot et noie ses soucis dans l’alcool et puis il ya Jonah, Jonah qui ne parle pas, mais adore courir nu dans la neige et faire ses besoins partout.

Ben est le narrateur et ce choix est formidable, car très vite on se met dans ses pantoufles de père dépassé par un petit garçon autiste âgé de 10 ans. Jonah n’a jamais appris quoique ce soit à l’école spécialisée où il se rend tous les jours, les crises de violence et surtout son incapacité à être propre et à dormir la nuit, ont fait exploser le couple que forme ses parents. Fatigués, éreintés, désespérés, ils rêvent que leur fils puisse intégrer une des meilleures écoles pour autistes (un pensionnat). Mais en Angleterre, les places sont attribuées par votre collectivité locale et le petit garçon relève d’un district différent, et donc d’une autre école.  Lorsque sa femme lui dit qu’en faisant appel de cette décision, ils auront une meilleure chance s’il se présente comme parent isolé, il accepte. Ben aime profondément son fils.

Le voici de retour chez son père avec qui les relations ont toujours été tendues. Le vieil homme ne s’est jamais confié sur son passé de survivant, et le voilà soudainement qui raconte sa vie à son petit-fils le soir en le couchant ! A son petit-fils autiste. Ben en est troublé. Il va découvrir tout un pan du passé de sa famille qu’il ignorait. Ben confie tout : ses doutes, ses espoirs, son désespoir, sa fatigue perpétuelle, son isolement et son goût prononcé pour l’alcool mais Ben possède un sens aigu d’auto-dérision (si cher aux Anglais), et il nous fait sourire. Oui, son fils a repeint la cuisine avec ses excréments, oui il a vidé tout le frigo, oui Noah ne parle pas – mais parfois, lorsqu’il a pris son bain, que son père a couru pour le sécher, une fois au lit, il écoute avec plaisir les histoires que son papi lui raconte. Quel lien invisible les unit ? Comment communiquent-ils ?

Un émouvant témoignage d’un père pour son fils autiste. Comment se battre quand chaque sortie est un véritable challenge, quand on doit affronter chaque jour le regard des gens et quand les spécialistes vous annoncent, que votre fils est autiste et que voilà, il ne parlera jamais, n’apprendra jamais à lire, ni écrire et qu’il sera un poids toute votre vie ? Mais Jonah c’est une personne, un sourire, des émotions, un petit garçon qui va vous faire craquer.

J’ai dévoré ce livre, le sourire aux lèvres car malgré les montagnes à escalader, Ben, toujours à moitié éméché, reste optimiste et on veut y croire. Une formidable leçon de vie qui vous mettra du baume au coeur.

♥♥♥♥

Editions Stéphane Marsan, Shtum, trad. Emmanuelle Ghez, 2019, 329 pages

Et pourquoi pas

5 commentaires

Autist Reading 21 février 2019 - 19 h 05 min

Encore une fois, je repars de chez toi avec une référence en plus ajoutée à ma déjà trop longue liste…

Electra 21 février 2019 - 21 h 42 min

Désolée ! J’ai beaucoup aimé …

Mes échappées livresques 22 février 2019 - 9 h 36 min

Livre dévoré également de mon côté! une belle surprise!

Electra 25 février 2019 - 8 h 34 min

Oui ! J’aime beaucoup le père, la distance qu’il réussit à mettre et l’honnêteté dans la manière de dresser son propre portrait. Un très joli moment de lecture.

Eva 4 mars 2019 - 15 h 42 min

c’est vraiment un livre que j’ai envie de lire !

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