Je n’ai toujours pas lu le plus grand succès de l’auteur allemand, mais je viens de finir ma lecture de Presque génial, son dernier roman.
Benedict Wells m’avait séduit avec son recueil de nouvelles, La vérité sur le mensonge . Du coup, je n’ai pas hésité à lire son dernier roman. Et là, grosse surprise ! J’avoue, j’ai été déstabilisée et je me suis posée des questions. J’ai douté : s’agit-il du même auteur ? J’ai trouvé le style légèrement différent et le langage ne m’a pas emballé. Mais surtout, j’ai longtemps pensé à un roman jeunesse, et je reste sur cette impression. Mais fort heureusement, la centaine de premières pages avalées, je suis restée dans l’histoire, accrochée. Et j’ai lu le roman d’une traite. En une matinée.
L’histoire est celle de Francis, jeune homme, en dernière année de lycée. Le garçon vit dans un trailer park à Jersey City. Il vit avec sa mère, qui vient à nouveau d’être internée. Dès qu’elle se sent mieux, elle cesse de prendre son traitement et replonge. Elle n’arrive pas à garder un seul emploi et ne s’est pas remise de sa rupture avec le père de son deuxième enfant, Nicky. Celui-ci en a désormais la garde. Francis et sa mère ont donc atterri dans ce trailer park. Francis n’a qu’un seul ami, Grover, un geek, victime de harcèlement au lycée. Lors d’une visite à la clinique, il croise la route d’une jeune femme, Anne-May, internée après une tentative de suicide. Francis tombe amoureux. Francis n’a jamais su qui était son père, mais il finit par apprendre la vérité. Il est le fils d’un donneur anonyme sélectionné pour son fort QI. Francis a comme un révélation. Il n’est pas un raté. Il a une mission : le retrouver. Francis décide de partir à l’autre bout du pays et embarque avec lui Grover et Anne-May dans ce road trip.
J’ai le sentiment que je n’aurai à regarder mon père qu’une seule fois, à lui parler qu’une seule fois, et que toute ma vie changera.
Le roman n’a aucun rapport avec le recueil de nouvelles, qui m’avait déstabilisé, troublé. J’ai aimé voir deux types jouer au ping-pong presque jusqu’à la mort, aussi me retrouver entourées d’adolescents mal dans leur peau, ce fut dépaysant. J’ai aussi, j’avoue, tiqué sur la traduction (se tirer une balle ne fonctionne que si on indique l’endroit en français par exemple). Bref, j’ai vraiment douté au départ. Mais les personnages, même si parfois, je les trouve légèrement stéréotypés sont attachants et la quête désespérée de Francis est touchante. Et puis, j’avoue, que je me suis prise au jeu et que j’étais surprise de voir que l’auteur ne raconte pas une histoire qui finit bien. A plusieurs moments clés du roman, l’auteur s’amuse à tromper le lecteur. Ce n’est pas un roman feel-good. Et la fin ? Je l’aime même si à nouveau, elle peut déstabiliser certains. Du coup, en y réfléchissant à deux fois, il s’adresse aux adolescents et aux adultes.
Car Francis est têtu et naïf et son entêtement va lui coûter cher. Et contrairement à un roman jeunesse, et comme lui fait remarquer Anne-May, il ne change pas, ne mûrit pas. Il continue de rêver et son comportement peut horripiler. Je me suis vraiment énervée contre lui et en même temps, il a seulement dix-sept ans et est seul, sans repères. Alors ?
Par contre, je trouve que le sujet de ces enfants nés de donneurs anonymes est bien traité. Comment se construire lorsqu’on ignore d’où on vient ? A quel point la génétique joue-t-elle sur notre personne ? Et dans le cas de Francis lorsque l’on vient d’une clinique chargée de créer des êtres plus intelligents ? J’ai aussi beaucoup aimé les personnages secondaires. Il y a donc de la profondeur dans ce roman. J’ai aussi le même bémol lorsque je lis le roman écrit par un Européen sur les Etats-Unis, il reste toujours cette fascination même si ici Benedict Wells ne donne pas une vision rêvée.
Si vous l’avez lu, je suis curieuse d’avoir votre avis. Je vais sans doute lire un jour La fin de la solitude, mais j’avoue que pour le moment je préfère son recueil de nouvelles, plus tordu.
♥♥♥
Editions Slatkine&Cie, trad. Dominique Autrand, 2020, 416 pages
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4 commentaires
J’ai donc supposé juste en lisant ton commentaire sur mon billet d’Oscar Lalo 😁
Pour sa défense, « Presque génial » a été écrit 7 ans avant ses nouvelles et 5 ans avant « La fin de la solitude », ceci explique certainement cela. J’espère vraiment (mais vraiment!) que tu ne feras pas l’impasse sur « La fin de la solitude »! Je suis d’ailleurs surprise que tu aies choisi en 2ème lecture » Presque génial » alors que tu me dis vouloir lire « La fin… » depuis en tout cas deux ans. Il est vraiment différent de ses trois premiers romans et surtout bcp plus abouti. L’histoire de cette fratrie en deuil est vraiment très touchante, bouleversante. Wells s’y réfère d’ailleurs dans son recueil de nouvelles.
Pour en revenir à « Presque génial », je l’ai lu très vite aussi et la fin est finalement bien trouvée même si sur le coup elle m’avait énervée tant il avait joué avec mes nerfs juste avant 😄 Le sujet identitaire est bien traité bien qu’il aurait pu être encore un peu plus approfondi. En bref, un roman sympa à lire mais qui ne restera pas dans les annales…
ah merci pour cette information, mais alors il a pris un sacré virage ! Oui, j’ai eu du mal à le reconnaître j’avoue ! mais on passe quand même un bon moment même si parfois le héros est énervant ! Pour son roman le plus célèbre, je ne le vois jamais en boutique d’occasion mais je me dis qu’il doit être disponible en Poche ?
C’est un roman qui me tente beaucoup, néanmoins je note tes bémols et je vais m’intéresser au recueil de nouvelles! J’ai découvert récemment que Benedict Wells était le cousin de Ferdinand von Schirach, auteur allemand dont j’ai lu un livre ou deux…
ah je ne connais pas ce Ferdinand mais j’adore ce nom !!! commence par le recueil, je pense qu’il te plaira !
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