Déjà le sixième volume des Rougon-Macquart. Un roman dont le titre ne me disait rien et qui risquait donc de m’ennuyer, mais non Zola reste Zola.
Après le clergé, Emile Zola s’est intéressé aux hommes de pouvoir et Eugène Rougon en est l’exemple parfait. Originaire de Plassans, monté à Paris sans le sou, mais avec la détermination féroce de réussir, Rougon, ancien avocat de province, a réussi à grimper les échelons au plus proche de l’Empereur. Mais en 1856, le vent a tourné et suite à une histoire peu fameuse, son poste de Président du Conseil d’Etat va lui être retiré. L’homme préfère prendre les devants et propose sa démission, qui est acceptée. Au grand dam de ses amis – alliés politiques et anciennes connaissances de Plassans, qui ne lui pardonne pas. Eugène Rougon aime le pouvoir et a profité de sa position pour aider nombre d’entre eux à obtenir ce qu’ils souhaitaient. Mais ces sangsues n’en ont jamais assez, et lorsque sa disgrâce est prononcée, ils décident de tout mettre en oeuvre pour le rétablir au plus vite dans son ancienne sphère.
Vous êtes bêtes de vous disputer. En France, dès qu’il y a cinq messieurs dans un salon, il y a cinq gouvernements en présence. Ca n’empêche personne de servir le gouvernement reconnu.
L’homme qui ne s’est jamais marié a une obsession : Clorinde, une Italienne montée à Paris avec sa mère, qui a ses propres objectifs, entre autres modifier la politique de l’Empereur vis-à-vis de l’Italie. Cette femme, sensuelle, fait tourner la tête de nombreux politiciens mais se refuse à Eugène qui va quand même la persuader d’épouser un jeune député. Un couple de Plassans lui a demandé son aide, car leur aïeule, en décédant, les a déshérités au profit de l’Eglise. Rougon a accepté de défendre leur cause. Il a aussi accepté de prendre sous son aile le fils de notables de Plassans, malgré son échec au baccalauréat. Rougon accepte ainsi de prêter son nom à des affaires parfois plus que discutables, comme celle de nommer un de ses amis au titre de Préfet. Un des passages qui m’a marqué est la distribution de la Légion d’Honneur, je vous laisse le découvrir. Rougon l’ignore mais à l’époque, le clergé a encore une part prédominante dans la vie des Français et son soutien va lui coûter cher. Les luttes intestines de pouvoir continuent, l’Empereur étant l’objet de toutes les attentions.
Un immense orgueil lui venait, l’idolâtrie de sa force et de son intelligence se changeait en un culte réglé. Il se donnait à lui-même des régals de jouissance surhumaine.
La guerre du pouvoir, l’ivresse du pouvoir est au centre de ce roman. Lorsque Rougon repart en campagne, la verve de l’auteur est à son apogée. Un homme qui aime l’attention, un homme qui sait manier la parole et dont les discours étourdissent le public. Rougon accepte le poste de Ministre de l’Intérieur. Il s’attaque à la presse, mène à tambour battant une politique d’arrestation et de condamnation aux bagnes algérien ou guyanais sans en jamais douter. Eugène ne regrette pas une seconde d’avoir causé la perte du frère de son ancienne logeuse – le pouvoir le grise. Cette montée puis cette chute, et ce retour triomphal m’a laisser un goût amer.
Voyez-vous, Rougon n’est pas un homme de gouvernement ; il aime trop le pouvoir, il se laisse griser, et alors il tape à tort et à travers, il administre à coups de bâton, avec une brutalité révoltante.
Il m’a bien entendu rappeler la politique actuelle, où les élus travaillent plus pour leurs alliés qu’ils ne se soucient de leurs électeurs. J’ai en tête certains élus, qui encore récemment, ont versé dans l’illégalité pour soutenir des projets menés par des amis… Qu’importe les conflits d’intérêts, la notion de probité… Le pouvoir est plus fort que tout.
Publié en 1876, le roman n’eut pas le succès escompté. L’Assommoir, publié après, relança cette série qui me passionne j’ai hâte de lire pour la première fois le septième volet.
Il n’y a pas un mot de trop, écrit Flaubert à George Sand. C’est solide, et sans aucune blague.
♥♥♥
Emile Zola, 2003 (1876), 453 pages
8 commentaires
J’aime bien ces billets réguliers sur les Rougon-Macquart (et désolée pour l’indigence du commentaire)..
non pas de souci ! moi aussi ! je pense que si quelqu’un veut faire un résumé il pourra s’en inspirer LOL
Tu verras, l’Assommoir, on en risque pas de l’oublier..;
ceux qui l’ont lu au collège l’avaient détesté .. du coup j’ai un doute ! moi j’ai lu Germinal
C’est le premier de la série que tu ne me donnes pas envie de lire 😅
N’empêche, le jour que je me déciderai, il me faudra sans doute passer par là!
oui mais pourtant il est très bien ! son écriture, et son regard sur la société, oui il faut lire Zola !
Il faut vraiment que je me décide à (re)lire ZOLA !
oui, oui et encore OUI !! LOL
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