Le poisson-chat aux trois yeux · Hikaru Okuizumi

par Electra
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Le Caribou continue notre défi en me proposant des auteurs inconnus. Ce fut le cas avec OKUIZUMI Hikaru, romancier japonais. J’ai appris après que ce roman fait partie d’une forme d’autobiographie en trois volumes. J’avais le choix avec deux autres romans, mais pas disponibles à l’emprunt, et comme j’adore (à présent) les romans japonais, je me suis lancée.

J’avoue qu’en relisant la quatrième, je réalise que je ne l’avais pas lue et que j’aurais sans doute mieux appréhendé ma lecture si je l’avais fait. En effet, dans ce roman, l’auteur revient beaucoup sur la religion, qui n’est pas mon domaine de prédilection.

Dans ce volet, l’auteur est un jeune étudiant qui vit à Tokyo et doit retourner dans sa province natale, dans la campagne japonaise, pour l’enterrement de son père. Son père avait déjà 50 ans lorsqu’il est né, il n’a jamais donc connu son père jeune mais il se souvient de leurs parties de pêche. Une légende familiale raconte qu’il avait un jour pêché un poisson-chat à trois yeux. Malgré son athéisme affiché, il avait été effrayé et avait cru à une malédiction.

Car la famille du jeune homme est une famille à part au village, encore sous le poids des traditions et vielles coutumes mêlées de shintoïsme. Ainsi, le jour où l’on honore les morts (leur Toussaint), il est interdit de tuer toute vie, mais son père l’emmenait pêcher ce jour-là. Ils ne fréquentaient pas non plus l’église. Né d’une famille avec trois fils, le père du narrateur avait combattu lors de la deuxième guerre mondiale et mal digéré la défaite de son pays. A son retour, il avait refusé de récupérer la maison familiale et s’était installé à Tokyo. C’est son frère cadet qui en avait hérité. Mais ce dernier, marié, n’a jamais eu de descendance. Le plus jeune oncle, Waturu, avait lui, connu une certaine errance avant de vouloir devenir pasteur, la religion chrétienne ayant fait son chemin dans les campagnes.

A l’enterrement, avec sa mère et sa soeur, le jeune homme retrouve ses oncles et sa tante, et en profite pour interroger ses oncles sur son père. Quel genre d’homme était-il ? Pourquoi refuser pendant des années toute forme de religion puis se tourner vers cette dernière à la fin de sa vie ? Sans descendance, la maison familiale devrait lui revenir, mais le jeune homme, conscient de ce poids, finit par rejeter cette tradition. Que se passe-t-il quand une famille s’éteint ? A-t-il le droit de refuser cet héritage familial comme son père avait réussi à le faire dans son temps ?

Le roman aborde ici le poids de la culture japonaise, l’héritage des traditions, surtout dans les campagnes, en racontant également l’échec de l’oncle dans sa première paroisse, il montre qu’on ne peut imposer une religion après des siècles de croyances païennes ou shintoïstes.

J’ai aimé ma lecture, malgré le fait que je l’ai arrêtée plusieurs fois, avant d’y revenir. J’ai aimé les passages sur les moments partagés avec son père, les échanges avec ses oncles. J’ai par contre eu du mal à la fin lorsque l’auteur s’attarde longuement sur les pensées religieuses du narrateur, ses doutes, sa vision du christianisme (très éloignée de la nôtre), du bouddhisme. J’avoue que ses réflexions religieuses m’ont un peu perdues. Fort heureusement, il revient à la réalité et la fin est touchante, lorsqu’il rejoint ses oncles. J’ai visualisé cette scène, sur une route de campagne.

L’auteur offre de magnifiques passages descriptifs de la beauté de la campagne japonaise, et je viens de regarder une série japonaise qui offrait aussi des merveilleuses images, avec ses maisons traditionnelles et les rizières.

J’aurais aimé, je l’avoue, que l’auteur ne s’attarde pas autant sur la religion, et qu’il raconte plus de choses sur ce père inhumé. Mais j’ai quand même apprécié ma lecture. Mais en y repensant, peut-être aborde-t-il sa jeunesse dans cette trilogie ? Je devrais peut-être chercher les deux autres volumes ? L’avez-vous lu ?

En attendant, je note que je lis vraiment énormément de romans japonais en 2024.

♥♥♥

Editions Actes Sud, 三つ目の鯰  trad. Pascal Simon, 2004, 156 pages

Photo de Maxx Gong sur Unsplash

Et pourquoi pas

8 commentaires

Sunalee 22 septembre 2024 - 18 h 32 min

Je ne connaissais pas cet auteur, mais le fait que le roman tourne autour de la religion me refroidit pas mal. Ce ne sera dont pas une priorité mais on ne sait jamais.
J’ai d’ailleurs encore beaucoup de romans japonais sur ma PAL, il faudrait que je m’y mette, ils ont été un peu mis de côté par les romans d’Asie du Sud-Est.

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Electra 23 septembre 2024 - 11 h 20 min

Oui, si j’avais lu la quatrième C je n’aurais pas été aussi surprise. Je ne connaissais pas l’auteur non plus (le Caribou…) mais finalement je me dis que lire les deux autres volets pourraient peut-être être intéressant. Mais je vais tenter de lire moins d’auteurs japonais et privilégier d’autres nationalités, mais ma prochaine lecture pour ce défi sera encore un auteur japonais ! tu es prévenue 🙂

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MIMI21 22 septembre 2024 - 19 h 40 min

Je ne l’ai pas lu et suis, pour ma part, dans « Olive, enfin » d’Élisabeth Strout que je ne te présente plus.

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Electra 23 septembre 2024 - 16 h 08 min

Non ! que du plaisir en perspective donc 🙂

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je lis je blogue 22 septembre 2024 - 20 h 39 min

En temps normal, j’aurais sans doute été tentée par ce livre mais je viens de lire Le pavillon d’or de Mishima et je préfère me méfier un peu des auteurs japonais.

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Electra 23 septembre 2024 - 11 h 21 min

ah j’ai encore le souvenir de lire Banana Kitchen il y. a dix ans et pas du tout accroché et me dire, les auteurs japonais et moi, ça ne passe pas ! Heureusement depuis j’ai découvert de magnifiques auteurs mais je te rejoins je ne pense qu’il serait bien de le lire après Mishima. Parfois, il faut mieux revenir à des auteurs plus contemporains.

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Marie-Claude Rioux 23 septembre 2024 - 14 h 09 min

Ouin… je ne pensais pas que la religion était à ce point présente. Je sais que ce n’est pas ton fort. J’aurais pensé à un autre titre.

Sur ce coup-ci, j’ai eu la main plus chanceuse que toi!

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Electra 23 septembre 2024 - 16 h 07 min

oui mais heureusement tu as mieux choisi pour le prochain défi ! 😉

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