Quel plaisir d’avoir été en si bonne compagnie pendant quelques jours ! Un coup de coeur ! Merci à Phillip Lewis et bonne nouvelle, le roman est déjà traduit sous le titre Les jours de silence.
J’ai longtemps croisé ce roman en hésitant à l’acheter, sa traduction en français m’avait rappelée que je voulais le lire (et quelle couverture, je vous la remets en fin d’article) mais j’hésitais encore. Puis finalement j’ai trouvé l’édition originale chez mon libraire. Je l’ai ensuite posé sur une étagère et un évènement a fait que je l’ai finalement enfin mis à la une de mon programme de lecture. Résultat ? Un énorme coup de coeur. L’incipit est déjà une réussite :
My father was one of only two children born in Old Buckram’s cinderblock hospital in the cold and bitter autumn of 1939.
Nous voici en Caroline du Nord. C’est le fils d’Henry Aster qui raconte ici la vie de son père et la sienne. Old Buckram se trouve au coeur des montagnes Appalaches (pas loin du Tennessee et de la Virginie, près des Blue Mountains). Henry Aster naît dans une famille où la lecture n’est pas un passe-temps reconnu. Or Henry n’est ni sportif, ni manuel. Très vite, il découvre l’existence de la bibliothèque municipale où il passe son temps à lire, puis à emprunter et finalement à voler des dizaines de livres. Sa mère, qui l’aime, s’inquiète pour lui. C’est un perte de temps, lui dit-elle. Tu vas loucher et bientôt il ne restera plus de livres à lire.. Va donc jouer avec tes frères ! Mais rien n’y fait. Henry grandit et ses excellentes notes lui permettent de faire ce qu’aucun autre n’a fait dans sa famille : aller à l’université. Il décide de quitter le Sud pour s’installer dans le Nord. Henry adore lire et choisit un peu par dépit des études de droit. Il tombe amoureux d’une belle jeune femme, Eleonore, passionnée d’équitation. Celle-ci est enceinte lorsque la mère d’Henry tombe malade. Henry vénère sa mère, Maddy, et décide de rentrer au pays.
And so in time he became an outsider, and would remain so, as all the great men and women of their day among their contemporaries.
Henry jette alors son dévolu sur une immense maison au style gothique, construite sur les Barrowfields. La maison est digne d’un film d’épouvante, sombre et menaçante mais Henry a voulu l’acheter car elle possède au centre sa propre bibliothèque avec des escaliers en colimaçons et des passages secrets. Même le drame survenu quelques années plus tôt ne l’effraie pas. Son fils (le narrateur) naît alors et sa femme achète ses premiers chevaux …
And yet despite all the folhardy extravagance and excess, there was inescapably an emptiness, a bleak chill, and a hostility to the house that could never be ignored or forgotten.
Henry père travaille pour le cabinet d’avocats local mais passe tout son temps libre dans sa bibliothèque, installé à son bureau dans une alcôve. Là, il lit mais surtout travaille d’arrache-pied sur son roman. Le roman de toute une vie. Il écrit jour et nuit et participe rarement aux activités familiales. Il continue d’aller prendre soin de ses parents et se promène parfois avec son fils dans son immense propriété. Sa femme a accepté ce choix de vie presque monacal. Son fils, impressionné par ce père studieux et brillant essaie de se rapprocher de lui. Il a réussi à faire admettre sa présence, en s’asseyant par terre et en lisant les nombreuses éditions originales que son père a collectionné au fil des ans. Une petite soeur naît et la famille vit heureuse. Henry et sa soeur, Threnodie sont très proches. Jusqu’au jour …où un évènement terrible vient bouleverser ce fragile équilibre. Quelque chose s’est brisé. Neuf jours plus tard, le père emporte son manuscrit et disparaît.
He became a ghost, my father.
Pour son fils, ce départ signifie la fin d’un monde. Adolescent, en colère contre son père, contre la vie, il fuit le plus loin possible en partant à son tour étudier. Les années passent et Henry, le fils, n’est pas revenu. Comment pardonner ? Comment se remettre d’une telle dévotion trahie ? Comment un enfant peut-il pardonner à ses parents ?
And we all left her – everyone of us but Mother. We left her there, in her encroaching world, where her magnificent heart diminished. I crossed the land between us with a sad and heavy heart.
Il y a l’histoire, magnifique – Philip Lewis a pour moi créé l’un des personnages les plus fascinants de la littérature américaine, Henry Aster Sr. et l’écriture. Sublime. Magnifique. L’atmosphère. La maîtrise spatiale, temporelle, narrative. Tout y est. Un grand roman américain. J’ai tellement marqué de passages. Et j’étais triste de savoir que j’allais bientôt finir le roman.
J’ignore si ce roman plaira à tous, je pense qu’ayant quelques points communs avec l’histoire familiale il m’a donc forcément parlé plus intiment. Mais même sans cela, il reste cette écriture, magistrale ! Une amie m’a demandé si la présence des chevaux sur les deux couvertures avait un lien avec l’histoire. La réponse est oui.
They were indeed doomed. But this eventual destruction was foreseen by no one at the time.
Ce roman est un futur classique et j’ai déjà envie de le relire ! J’ai marqué tellement d’endroits que je ne sais plus lesquels reprendre ici…
There is a stillness that exists somewhere else in the world among the places I have been. It’s always there, lurking just beyond the invented clamor and tumult of the day. Yet this stillness is not one of quiet comfort. It is not the drowsy calm that descends when the earth turns away from the sun and all living things find shelter and warmth and sleep. No, it is not this. It is a stillness of disquiet. It is a terrifying midday silence of nothingness and desolation.
♥♥♥♥♥
Editions Sceptre, 2017, 368 pages
Photo by James Wainscoat on Unsplash
18 commentaires
Devant un tel enthousiasme, je ne peux que le noter !
Oui !! oui oui !
Au moins on a gardé les chevaux en couverture!
OK, convaincue 😉
super ! à lire en anglais pour toi du coup !
Oui même en français et ils ont leur importance dans le récit ! je préfère presque la couverture française pour une fois !
Quel enthousiasme en effet ! On sent à quel point ton plaisir de lecture a été grand et forcément ça donne très envie.
oui il est magnifique ! Je me suis dit c’est un roman « de mec » au départ et ça l’est un peu, j’avais oublié de suivre des personnages masculins et quand c’est si bien écrit (quelle claque!) ça passe tout seul !
Après un tel billet, difficile de ne pas être tentée!
j’espère en effet !! je veux que tout le monde le lise, non je l’exige ! LOL
Tu donnes sacrément envie dis donc ! Je me le note !
oh oui ! et puis te connaissant, il va te plaire, c’est certain !!!
Tu m’avais déjà convaincue! Je l’attends avec impatience.
Oui ! j’espère que la traduction est à la hauteur du roman mais apparemment oui !
J’ai lu la version française à sa sortie en 2018 et ai eu la chance d’écouter l’auteur lors d’une rencontre en petit comité au Festival America. Un auteur passionnant et passionné! Drôle aussi, il a avoué sniffer ses livres! 😂 J’espère qu’il publiera bientôt un autre roman!
OH quelle chance ! je l’ai loupé pourtant j’étais bien au Festival ! Mais il m’a remercié hier donc je suis très heureuse ! sniffer ses livres ? j’adore les livres de photographie, leur odeur mais sinon.. oui j’espère qu’il est reparti dans l’écriture, j’ai adoré le premier roman d’un autre auteur et il n’a jamais donné suite …
repéré depuis un certain temps, mais pas encore eu l’opportunité de le lire, mais ton enthousiasme est plus que tentant !
oh que oui ! je pourrai le relire de suite ! je pense qu’il te plairait beaucoup 🙂
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