Après avoir lu en. 2019 et beaucoup aimé son précédent roman, Grace, j’avais envie de découvrir le tout dernier roman de l’écrivain Paul Lynch.
Sans préciser le nom du pays, Paul Lynch nous embarque dans une épopée peu banale. Malgré l’annonce d’une tempête et le retour de pêcheurs au port, Bolivar, est décidé à partir. Rien ne lui fait peur. Son coéquipier absent, il convainc un jeune homme, Hector, de prendre la mer avec lui. Il lui propose même la moitié de la recette. Le jeune garçon accepte à condition d’être rentré pour son match de football.
Mais la tempête est là, et malgré ses années d’expérience, Bolivar comprend rapidement que son canot de pêche ne peut cette fois-ci remporter la bataille. Le moteur meurt et les voilà tous les deux à la dérive, à la merci des éléments, prisonniers de l’océan Pacifique. Les deux pêcheurs se réfugient dans la glacière, et ne sortent que pour écoper l’eau. La tempête passée, c’est le calme et le soleil implacable qui s’installent. Très vite, ils ont peur de manquer d’eau et la nourriture se compose uniquement de poissons qu’ils en peuvent pas cuire.
Hector plonge dans une forte dépression. Il compte les jours et au bout du soixante-treizième, il tombe malade. Bolivar a tenté de le rassurer, et pendant quelque temps cela a fonctionné. Les débris qu’ils ont récupérés au cours de leur traversée leur ont permis de se fabriquer un filet et un harpon, et de se nourrir correctement. La pluie est revenue, leur apportant l’eau. Mais l’espoir s’amenuise. Ni les navires, ni les avions ne les voient.
Comment fait-on pour résister ? Hector a la foi, Bolivar, l’expérience. Il ne veut pas croire qu’il a échoué. Qu’il ne reverra pas Rosa. Bientôt le bon sens cède au délire. Le soleil et le manque d’eau potable peuvent rendre fou n’importe quel damné. Car ce canot semble s’être perdu dans l’antre du Diable.
Muets de saisissement, Hector et lui regardent le monde se recomposer dans une magnificence de couleurs. Comme s’ils étaient les premiers à contempler des ciels pareils. Chacun commence à entrevoir la vérité de l’autre, à deviner qu’ils sont tous les deux pareillement démunis au cœur de la vérité des choses. Et qu’au sein d’une telle immensité, ce qu’un homme porte en son cœur n’a plus guère de poids.
Paul Lynch a une très belle écriture. Le sujet est grave. Etonnement, j’ai lu récemment le récit de deux pêcheurs, pris aussi dans une tempête qui ont dérivé pendant plus de soixante jours, je crois, avant d’être retrouvés vivants. Le récit de Paul Lynch m’a plu – mais malheureusement je n’ai pas été aussi sensible au sort de Bolivar que je l’étais pour les personnages de Grace. Je suis restée en retrait, peut-être parce que l’histoire ne prenait pas la tournure que je souhaitais ? Ou parce que Bolivar ne me plaisait pas, je n’ai pas accroché à sa manière de voir le monde – et de traiter Hector.
J’ai toujours du mal avec les hommes qui lui ressemblent et qui répètent sans cesse « moi, je ne suis qu’un pêcheur » mais qui au final, ont un ego si développé qu’il les pousse à faire des choses stupides, comme de prendre la mer un soir de tempête et les regrets sur son passé (il a abandonné femme et enfant) m’ont aussi dérangé. Je n’aime pas ce nombrilisme. Si cette fois-ci Bolivar fait son exercice de conscience, c’est parce qu’il est forcé de le faire. Si son canot n’avait pas dérivé, il serait rentré au port et n’aurait jamais pensé à sa fille. J’ai par contre beaucoup aimé le personnage d’Hector.
Paul Lynch offre à chaque lecteur et lectrice une profonde réflexion sur l’être humain, son rapport à la nature, aux autres. Ce roman ne vous laissera pas indifférent. Comment réagirions-nous ? Je me suis posée la question.
Et comme je le disais avant, Paul Lynch maîtrise parfaitement son style. Les critiques que j’ai lues sont élogieuses, donc ne vous fiez pas à mon seul avis ! Je lirai son prochain, c’est certain.
♥♥
Editions Albin Michel, Beyond the sea, trad. Marina Boraso, 2021, 240 pages
6 commentaires
Je n’ai encore jamais lu Paul Lynch et j’ai souvent lu des avis mitigés le concernant. J’hésite à me lancer du coup.
Honnêtement, j’ai préféré largement Grace mais si tu veux commencer par un roman court, pour découvrir le style, celui-ci peut convenir !
Le seul roman que j’ai lu de lui (Un ciel rouge le matin) m’est tombé des mains. Je n’ai jamais réessayé depuis.
Je comprends. Pour ma part, j’ai lu et beaucoup aimé Grace (famine en Irelande), du coup j’avais envie de lire celui-ci. J’avais acheté Un ciel rouge le matin mais à l’époque je ne l’avais pas conservé. Je vais peut-être tenter de le lire !
J’ai trouvé ce livre hypnotique… j’en parlerai dès que je rouvrirai mon blog !
Ah oui ! Curieuse de connaître ton avis du coup !
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