The Goldfinch • Donna Tartt (ou le Chardonneret)

par Electra
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J’ai fini de lire il y a quelques jours le roman de Donna Tartt, qui lui a valu le Prix Pulitzer : The Goldfinch. Je l’ai lu en anglais d’où le titre. Le chardonneret est la traduction littérale du titre anglais. J’arrive un peu tard par rapport à la blogosphère mais je suis fière de moi, en effet, ceux qui me lisent, ont su que pendant presque deux mois, aucun livre ne trouvait d’intérêt à mes yeux. Ma saison annuelle de sécheresse littéraire terminée, j’ai enfin pu avaler un roman de près de 700 pages (et deux autres romans). 

La romancière aura mis près de dix ans pour écrire ici un roman jugé magistral, portrait féroce de la haute bourgeoisie new-yorkaise et de l’Amérique, un mélange de Dickens et de Mark Twain.L’américaine réussit une prouesse qui lui vaut le Prix Pulitzer. Je l’avoue sans détour, les premières années du héros, Théo Decker (le livre est à la forme narrative, à la première personne) sont passionnantes. L’enfant, élevé à New York, par une mère belle, intelligente et profondément aimante (totalement fantasmée par son fils) se retrouve soudainement orphelin lorsqu’un attentat à la bombe le prive de cette dernière alors qu’ils visitent le Met. Le jeune Théo, choqué par l’explosion, se saisit de la toile préférée de sa mère, The Goldfinch de Carel Fabritius (1654) peintre du 17ème siècle et disparait. La toile, de taille minuscule, dépeint un oiseau, un chardonneret, enchainé à un perchoir à l’intérieur d’une maison.

Cette chaine est symbolique : le héros lui-même se retrouve enchainé à ce tableau, cette toile mystérieuse et envoutante  qui symbolise l’amour de sa mère, dont il n’arrive pas à accepter la disparition soudaine. Théo sera d’abord accueilli dans une famille de la haute-bourgeoisie new-yorkaise avant d’être embarqué à Las Vegas par son père, un homme qui symbolise ici l’Amérique des perdants, des déchus, ceux qui continuent de croire au rêve américain à coup de jeux (poker, paris sur le sport), son destin n’en sera que plus tragique. Le jeune Théo croise alors la route de Boris, l’adolescent russo-ukrainien, élevé dans l’ère de la mondialisation où tout s’achète, se paie et se vend. Les années passent, le jeune Théo vit de nouveau New York,  vendeur d’œuvres d’art à de richissimes familles qu’il arnaque en vendant de fausses antiquités et fréquente à nouveau la famille qui l’avait accueillie, mais il ne cesse d’être obsédé par la toile de Fabritius.

Ce roman initiatique prend alors la tournure d’un thriller lorsque Boris lui avoue lui avoir dérobé l’original il y a des années et que les deux jeunes trentenaires s’envolent pour Amsterdam à la recherche du précieux tableau. Si j’ai moins aimé cette partie de l’histoire, j’ai adoré les digressions de la romancière sur l’art en général : à travers l’obsession de son héros pour cette toile, elle analyse la fascination existante pour certaines œuvres d’art – comment celles-ci ont été élevées au rang de trésors culturels et sont devenues inestimables, comment explique-t-on la beauté, comment juger du prix d’une œuvre d’art ? Moi qui suis passionnée d’art, et qui fréquente beaucoup les musées, j’ai aimé cette réflexion.

J’ai commencé la lecture de ce roman avec difficulté, puis après deux ou trois chapitres, j’ai été emballée par le foisonnement de l’histoire, par les chapitres entiers consacrés à la rénovation des pièces d’antiquité, du travail du bois, par le détail apporté avec soin par l’auteur à chaque meuble, chaque pièce, par son talent pour transcrire l’atmosphère feutrée de l’appartement d’Andy, par l’écriture fluide et romancée, le rythme soutenu et le talent indéniable de l’écrivain pour retranscrire l’immense douleur de l’orphelin. 

 Mais mon emballement a cessé au deux-tiers du roman, lorsque le héros est de retour à New York et s’enfonce dans une vie d’illusions, la drogue est son meilleure compagnon, incapable d’affronter ses fantômes, il vit dans le mensonge et ne semble jamais être capable de s’extraire des limbes dans lequel son esprit flotte depuis longtemps. 

Je me suis, j’avoue, lassée du personnage principal et j’ai eu hâte de terminer la lecture, non pas que je rejette les dernières pages, passionnantes lorsque la romancière parle du beau, de l’art mais parce que je ne supportais plus ce héros, qui traine sa dépression de page en page – attachée au jeune Théo de 13 ans, celui de 30 ans m’ennuyait, voire m’exaspérait au fil des pages, son inertie particulièrement. Je suis quelqu’un de dynamique, battante or ici le personnage, pourtant orphelin à un très jeune âge ne connaît pas de résilience – il se complait dans son malheur et la perte de la toile ne va engendrer chez lui aucun déclic. Il sombre à Amsterdam et entraine le lecteur avec lui.  Enfin, j’avoue que la partie thriller (en Europe) ne m’a absolument pas parlée, ni enchantée.

Cependant, grâce à ce livre, j’ai découvert tout le talent de l’écrivain, et j’adore son style – j’avais acheté en poche son roman le plus célèbre Le Maître des Illusions que je réservais et je sais que je vais être ravie de retrouver ce style si riche et si fluide. 

J’espère ici que je ne tomberais pas en désamour du héros, Richard Papen comme ce fut le cas avec Théo Decker. 

En résumé, ce livre est passionnant, et m’a totalement séduit lorsque que l’écrivaine traite des œuvres d’art (je suis tombée amoureuse de ce chardonneret) ou lorsqu’elle dépeint la haute bourgeoisie, je le conseille vivement à tous les amoureux des livres. Ce roman mérite pleinement son prix. 

Je le conseille en anglais, of course! 

♥♥♥♥♥

Et pourquoi pas

2 commentaires

Marie-Claude Rioux 1 janvier 2015 - 19 h 55 min

Oh non… Theo vient d'avoir 30 ans… Je poursuis ma lecture avec peu d'entrain!

Electra 2 janvier 2015 - 10 h 28 min

Oh déjà ? ça passe trop vite .. Hâte de lire ton billet !

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