Catharsis – Luz
♥♥♥♥
Une lecture à part puisqu’il s’agit de la bande-dessinée signée Luz après les attentats du 7 janvier 2015. Ce jour-là, l’amour aura sauvé deux vies : Luz et Catherine Meurisse arriveront avec une heure de retard dans les bureaux de Charlie Hebdo. Le premier car c’est son anniversaire et sa compagne lui a réservé un réveil tout câlin, la deuxième ne se remet pas d’un gros chagrin d’amour qui l’a retenu au lit. Tous deux survivront, ils ne sont pas blessés physiquement mais brisés.
Les deux dessinateurs connaîtront tous deux une longue phase de dépression dont le premier symptôme sera la page blanche.
Luz n’arrive plus à dessiner. Lorsqu’il reprend enfin la plume, c’est pour tenter d’exprimer ce qu’il ressent : les cauchemars (nombreux), l’absence, la douleur, la peur, la présence oppressante de ces gardes du corps mais aussi le soutien et l’amour de sa compagne – elle joue un rôle essentiel dans sa renaissance. Luz est paralysé, comme ce petit être de la couverture. Entre la peur terrible d’être le prochain, la culpabilité d’être encore là et surtout la perte de tous ses amis, Luz va se reconstruire. Un cheminement long et compliqué mais magnifiquement dessiné dans le livre, qui passe par une mise à une. Ici point de misérabilisme – il se rêve courageux, mais se sait traumatisé. J’aime chacune des planches comme celle très puissante où il enseigne le dessin à deux enfants, qui à l’adulte seront devenus les bourreaux de Charlie Hebdo. L’humour est de retour par petites touches mais surtout c’est l’amour de sa compagne, l’amour des siens qui va lui permettre de remonter la pente. Luz a publié cette bande-dessinée en mai 2015.
J’ai depuis vu une longue interview de Catherine Meurisse, l’autre retardataire dont la reconstruction se fera à travers l’art. Elle a quitté Paris, la France pour s’expatrier à la Villa Médecis à Rome. Ayant toujours une passion pour le beau, j’ai très envie de lire sa bande-dessinée. J’aime cet art qui permet en deux ou trois coups de crayons d’exprimer une multitude d’émotions, une palette de sentiments et ainsi nous interpeller au plus profond de notre être.
Editions Futuropolis, 128 pages, 2015
N’embrassez pas qui vous voulez – Marzena Sowa et Sandrine Revel
♥♥♥
J’ai choisi principalement cette lecture par la qualité du dessin, je découvre qu’il s’agit de l’oeuvre de Sandrine Revel, une dessinatrice reconnue pour ses dessins pour enfants et ses livres-témoignage, elle est également illustratrice et peintre à ses heures. Marzena Sowa a écrit Marzi, une série autobiographique sélectionnée au Festival d’Angoulême. Ici, elle livre son premier récit de fiction. Cette fois-ci, elle présente son pays, la Pologne, à hauteur d’enfant : à la fois tendre mais d’une réalité parfois glaçante. J’ignorais qu’il s’agissait de la Pologne. Le lecteur voit des enfants assister à un film à la gloire de Staline, lorsqu’un petit garçon assis dans la salle essaie d’embrasser son « amoureuse » – à l’époque de la dictature communiste, bien avant la chute du mur, cet évènement va prendre des proportions hallucinantes.
Le petit Viktor est convoqué par le directeur de l’école, pendant que sa maitresse interroge les autres enfants. Ceux-ci, innocents vont alors révéler qu’ils aiment bien aller chez Viktor pour regarder des dessins illustrés dans une autre langue (le français) ou écouter les poèmes que le père de Viktor écrit. La suspicion grandit : le père est-il un homme aux idées subversives ? Et a-t-il transmis ces idées pernicieuses à son fils qui ne semble pas réaliser la gravité de ses actes ?
J’ai beaucoup aimé cette lecture, tant les propos, où l’on voit ici l’espoir et la résistance et l’aspiration à la liberté résonner dans le coeur des enfants à travers la poésie ou les jeux. Et j’ai vraiment beaucoup aimé la douceur de la plume de Sandrine Revel, les dessins expriment cette innocence et cette bonté face à une dictature sans merci où les gens disparaissent subitement. A la fin de la bande-dessinée, Marzena raconte son voyage dans sa famille, au sud de la Pologne avec Sandrine en 2010. Le mur est tombé et la nouvelle génération ne veut plus entendre parler de cette époque, au grand dam de l’artiste. Ce récit lui permet enfin d’exprimer toute cette ambiguité.
Editions Dupuis, 104 pages, 2013
Lydie – Jordi Lafebre et Zidrou
♥♥♥
Dans l’impasse du bébé à moustaches, la jeune Camille accouche d’une petite fille, Lydie, mort-née. Nous sommes en 1932, Camille est une jeune femme simplette, on ignore qui est le père de l’enfant. Elle vit dans cette impasse avec son père Augustin qui doit affronter cette tragédie. On offre à l’enfant une jolie sépulture. Tous les habitants de la rue sont effondrés car ici on s’épaule, on s’entraide et tout le monde, même la poivrote du bar se sont attachés à Camille, malgré son handicap. Mais un jour Camille accourt, les anges du ciel lui ont rapporté son enfant ! A la grande surprise de son père, Camille tient dans ses bras son bébé… imaginaire …
C’est le dessin de Jordi Lafebre qui m’a d’abord attiré et puis l’époque, les années 30. J’ignorais tout de l’histoire en l’empruntant. Le scénario est signé Zidrou qui offre ici une belle histoire proche du conte. Le dessin est sobre mais c’est un choix judicieux, et j’adore son coup de crayon.
J’avoue je ne m’attendais pas du tout à ce récit doux-amer et il ne laissera personne indifférent. Le duo s’est apparemment retrouvé dans La Mondaine, le Paris des années 30 – une histoire beaucoup plus cocasse, mais qui me tente également !
Editions Dargaud, Long Courrier, 2011
6 commentaires
Comment ça tu n’as jamais lu Marzi?
non……………………bip…………bip…….
Marzi est une excellente série jeunesse, donc je retiens le premier titre ! Concernant Lydie, je dois être un des rares à passer à coté. Je n’y ai pas cru à cette histoire, tout simplement. Du coup forcément, mon ressenti ne pouvait pas être positif 😉
Bon encore Marzi… 😉
Pour Lydie, j’ai trouvé ça bizarre à la fin surtout .. toute une vie, oui difficile d’y croire mais j’ai aimé le dessin et les années 30.
J’ai adoré Lydie, comme tout ce que fait Zidrou d’ailleurs… 😉
Je ne connaissais pas, le dessin est joli et l’histoire, elle ressemble à un conte de fées ! Jérôme n’y a pas cru 😉
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