Summer • Ali Smith

par Electra
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Summer, le dernier opus du quartet d’Ali Smith ! J’étais forcément impatiente de pouvoir enfin le lire, mais aussi un peu triste en sachant qu’il s’agit du dernier. J’ai adoré les trois précédents (Autumn, Winter and Spring) aussi, j’étais un peu. nerveuse en commençant ma lecture …

Je vous avoue : j’ai eu un peu peur en tournant les premières pages. Mais, non. Erreur de ma part. Evidemment on retrouve le style très particulier de l’autrice anglaise. Parfois elle s’adresse à vous directement, pour vous embarquer directement au sein d’une famille, d’un couple, etc. Pas d’introduction formelle. Rien. Elle saute du coq à l’âne. Ici on suit Sarah  Greenlaw pour retrouver sa famille, un peu désordonnée, et son frère, Robert, 13 ans, qui s’éprend d’une jeune femme, Charlotte, inconnue au bataillon. La jeune femme est accompagnée d’un jeune homme qui doit aller à la rencontre d’une personne ayant connu son père. Mais Robert est totalement troublé par la jeune femme. Qui se révèle aussi intelligente et brillante que lui. Les conversations fusent, les échanges sont dynamiques et relevés. Mais vous ignorez sans doute que ce même jour, Robert a eu la bonne idée de jouer un sale tour à sa grande soeur sur la plage. Elle s’est retrouvée avec les deux mains collées à la superglue.  La jeune fille a fini aux urgences. Et c’est Charlotte et son ami qui l’ont prise en charge sur la plage, et l’ont amenée à l’hôpital. Vous arrivez à suivre ?

Robert : I only need English. Needing or anything more is unpatriotic.

Charlotte : Languages don’t exist singly. They’re like family. They all feed into each other all the time. There’s no such thing as an isolated language.  The boy went red.

Deux chapitres plus loin,  Charlotte mentionne Hero, un immigrant qui a fui un régime totalitaire et qui se trouve en centre de rétention. Sarah décide de lui écrire. Et puis soudainement, nous voilà 70 ans en arrière.  L’Angleterre était en guerre contre l’Allemagne et avait créé des camps d’internement dont le camp Douglas sur l’île de Man. Ils y mettaient tous les citoyens allemands qu’ils soient sympathisants nazis ou Juifs. Drôle de mélange. L’un d’eux, Daniel, enfermé là, était né en Angleterre. Il passait tous ces étés en Allemagne avec sa famille, sa mère et sa petite soeur qui l’appelait affectueusement son « summer brother ». Il vivait le reste du temps en Angleterre avec son père et n’avait jamais songé à demander la nationalité anglaise. La guerre les a internés, père et fils… Daniel apparaît déjà dans le premier volet, Autumn. La boucle est bouclée.

My mother has his saying, about the swifts* being what make a summer happen : it’s when the swifts arrive and when the swifts leave that marks the start and the end of a summer. (*martinets)

Ali Smith tisse sa toile, nous sommes en 2020, en mai avec Sarah et Robert. Le virus circule. Le Brexit a eu lieu. Les centres de rétention existent toujours. Et l’été est là. Un tourbillon que ce roman qui aura réussi à m’arracher une larme à la fin. Car Ali Smith défend ici comme jamais l’humanité, la chaleur humaine, comme celle du soleil sur nos corps l’été. Elle réussit à nous replacer au centre et à montrer tout ce qui se perd peu à peu. Le roman est puissant. Elle nous rappelle que nous sommes tous les chaînons d’un même collier. De la même famille. Mais elle le fait si intelligemment, c’en est impressionnant.

Summer brother autumn sister
Time and time again are gone
Out of season I will find her
With time’s fallen leaves behind her
Every time I sing this song

Dans chaque volume il y a des références à l’art, à l’immigration, à la famille, à Shakespeare, à Dickens, à la nature. Je vais assurément les relire ! J’aime la poésie, l’humour, la légèreté de ses romans malgré la gravité du propos. Ali Smith est une véritable équilibriste. Un trésor national. Que le Brexit ne réussira pas à nous enlever.

♥♥♥♥♥

Hamish Hamilton (Penguin), 2020, 379 pages

 

 

Et pourquoi pas

10 commentaires

keisha 14 septembre 2020 - 8 h 30 min

Donc il vaut mieux démarrer par Autumn, le premier? Mais j’attends de le trouver en bibli, par exemple, histoire de tenter

Electra 18 septembre 2020 - 19 h 53 min

Oui, il vaut mieux lire les quatre dans l’ordre chronologique (ici juste après le référendum) tu apprécieras plus !

krol 14 septembre 2020 - 21 h 31 min

Il faudra que je tente… avec le premier bien sûr. Je n’ai jamais lu l’auteure.

Electra 18 septembre 2020 - 19 h 54 min

Ah bon ? J’ai adoré ses romans, j’ai moins accroché à ses nouvelles. Celui-ci est tellement parlant, normalement ils vont traduire les autres et sans doute les sortir au bon moment.

Mes échappées livresques 15 septembre 2020 - 9 h 42 min

Pas emballée par Automne, je passe mon tour…

Electra 18 septembre 2020 - 19 h 56 min

On n’a pas vraiment les mêmes goûts, la preuve, aucun de tes livres de la rentrée ne me tentent 😉 La littérature française ne me parle pas, exceptée pour deux ou trois auteurs. Désolée que tu n’es pas accrochée, il y a, c’est vrai beaucoup de références aux grands auteurs anglais et au Brexit donc forcément ça ne parle pas à tout le monde et puis j’adore sa manière de parler de chaque saison… j’ai lu et adoré les quatre. J’espère que tu vas aimer ta sélection !

L&T 18 septembre 2020 - 20 h 39 min

Bien envie de découvrir cette saga…

Electra 19 septembre 2020 - 14 h 30 min

Le premier volume (automne) a été traduit, si tu es pressée tu peux les lire en anglais.

athalie 19 septembre 2020 - 10 h 44 min

Je viens de vérifier, le premier tome est en poche, je crois que je vais rapidement me laisser tenter par la découverte de cette auteure.

Electra 19 septembre 2020 - 14 h 31 min

Oh super ! Elle est connue pour commenter l’état de la nation britannique et ici elle ne s’en prive pas. Elle l’avait annoncée d’ailleurs qu’elle écrivait ce quartet en réaction au Brexit mais elle écrit très bien et j’aime beaucoup ses personnages.

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